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Un Blogue CathoGay
30 mars 2006

254. le temps des prophètes gris

Dans les questions cathogay, je me demande si ce n'est pas aujourd'hui le temps des séniors. Peut-être même que c'est le cas pour un tas de questions dans l'Eglise Catholique Romaine: je suis en train de me demander si le salut et la nouvelle jeunesse de l'Eglise ne nous viendra pas d'un certain nombre de chrétiens âgés (prêtres et évêques surtout), qui se lèveront pour dire, dans des mots prophétiques, qu'il est temps de revenir à l'essentiel. Je pense à quelqu'un comme l'Abbé Pierre (largement sénior) ou aussi à Mgr Thomas Gumbleton (qui vient de prendre sa retraite d'active). De ces deux figures prophétiques, je vous ai déjà parlé (cliquer sur le lien pour les relire). Mon propos aujourd'hui est plutôt de vous faire découvrir des visages venus du Canada...

Selon la formule consacrée, nos correspondants locaux nous ont informés (je les embrasse en passant) de la récente position du bureau de la Conférence Religieuse Canadienne (la CRC). Deux choses pour comprendre: les évêques canadiens vont bientôt aller à Rome, pour la fameuse visite ad limina, littéralement, leur pélérinage pour passer les seuils (limina) des basiliques des saints apôtres Pierre et Paul et, accessoirement, rendre visite au pape et à tous les responsables des dicastères vaticans.

Bien sûr, au fil du temps, l'accessoire est devenu l'essentiel voire l'obligatoire. Les conférences épiscopales font cette visite ad limina tous les cinq ans. L'occasion aujourd'hui pour les évêques de partager leurs soucis, de raconter leurs travaux et leurs combats, de s'informer, d'être informés et, globalement, de renforcer le lien entre les Eglises Locales et le Siège Apostolique. Parfois, les évêques vont "au rapport" à Rome, pour se faire tancer ou bien pour rendre des comptes. Parfois, c'est une vraie rencontre fraternelle pleine d'encouragements. Et donc, on comprend que la CRC écrive un document pour les évêques, à la veille de leur voyage à Rome.

Deuxième remarque: comme en Belgique, comme en France, les religieux (hommes ou femmes) forment des communautés âgées pour la plupart (sans que cela ne préjuge ni de leur sainteté, ni de leur dynamisme, soyons clairs). Au Canada comme ailleurs en "Occident", les religieux sont plutôt un corps de séniors.

Et que dit la CRC dans son document? En fait, ça se résume en trois phrases qui se répètent: Nous reconnaissons... Nous regrettons... Nous souhaitons... Vous le trouverez ici en format PDF.

Une démarche magnifique: on y trouve tout ce qu'ils apprécient et ce en quoi ils croient, leur regard lucide sur des limites ou des manques dans l'Eglise (surtout au Canada, bien sûr), et l'expression de leurs désirs pour le meilleur. Et cela dans tous les domaines: la vie de l'Eglise, la liturgie, l'engagement social, etc. Avec, pour le sujet qui intéresse votre humble serviteur, les questions liées à la position de l'Eglise Catholique officielle sur la sexualité en général et les minorités sexuelles en particulier.

J'aime beaucoup ce texte. Je le trouve vrai, évangélique et très encourageant. Mais je vais jouer les oiseaux de malheur: ce texte et cette démarche sont certainement voués à l'échec. Et cela même avant de l'avoir lu. Dès sa publication. Dès la première ligne. Je ne suis d'ailleurs aucunement surpris de l'accueil glacial que l'épiscopat canadien lui a réservé.

Je m'explique: Tout d'abord, la première ligne du document de la CRC commence par "à nos frères évêques". Et là je dis: quelle erreur de se mettre sur ce terrain. Le peu que je sais des évêques me fait dire qu'ils ont plus que certainement été vexés de ce genre de familiarité. Autant les évêques aiment nous dire "mes biens chers frères et soeurs", autant ça les irrite qu'on leur rappelle qu'ils ne sont que des hommes comme les autres... Je suis prêt à vous parier que les évêques canadiens ont trouvé que la démarche de la CRC leur manque de respect.

Une autre erreur, plus fondamentale à mon sens, c'est que ce document suggère qu'il y a une meilleure (ou même tout simplement une autre) vision des besoins et de la réalité de l'Eglise que celle que les évêques ou le pape peuvent avoir. Une telle démarche est certainement vouée à l'échec. Il est absolument impossible, à mon sens, que le corps épiscopal et en particulier le Vatican acceptent qu'ils ne savent pas tout ce qu'il faut savoir de l'état de l'Eglise et de ce qu'il faut faire. Et là encore, je suis prêt à vous parier que les évêques canadiens et ceux du Vatican vont trouver que le document de la CRC est à tout le moins arrogant et présomptueux... et peut-être même qu'il frise la dissension ou, pire, la rébellion.

Mais je rends grâce à Dieu malgré tout. Merci, Seigneur, de ces prophètes aux cheveux grisonnants qui n'hésitent pas à témoigner de leur foi, de leurs désirs et de leurs projets pour ton Eglise.

Et là où les prêtres ou les cathogay plus jeunes n'osent pas se montrer en pleine lumière parce qu'ils ont peur (et j'avoue que je suis de ceux là), j'espère qu'un plus grand nombre de séniors se lèveront encore pour venir à notre secours.

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