419. conseils d'un vieux sage

Le débat animé hier, au Parlement Européen, sur les diverses chasses aux sorcières lancées par le gouvernement polonais en dit long sur la situation dans ce pays. En vedette, la situation de Bronislaw Geremek qui est menacé d'être "démis" de son mandat de député européen, comme si un gouvernement national ou une administration peuvent en décider. Mais ce qui m'a encore davantage inquiété dans l'article du Monde que je vous indique, c'est que Bronislaw Geremek "a reproché au gouvernement polonais, outre l'affaire Geremek, de vouloir interdire d'enseignement les professeurs homosexuels". En effet, il serait bientôt possible de démettre un enseignant polonais de son poste s'il dit du bien des homosexuels. Je trouve curieux qu'un gouvernement qui entend débusquer les collaborateurs des polices secrètes de l'époque du communisme utilise des méthodes semblables de persécution des pédé. Comme si un homophobe, quel que soit sa couleur politique, finissait toujours par se transformer en tyran...

Plus largement, le Parlement Européen déclare une tolérance zéro pour l'intolérance, y compris l'homophobie. Et le gouvernement polonais a déjà déclaré depuis que la décision du PE était "discutable". Signalons que l'assemblée des eurodéputés a évoqué la récente interview de Mgr André-Mutien Léonard, évêque de Namur, qui déclarait savoir que l'homosexualité était une "anormalité". Un exemple dans la longue liste des positions qui renforcent l'homophobie dans différents pays européens.

Complètement à l'opposé de ces attitudes, je salue le beau geste politique de l'ancien président italien, Oscar Luigi Scalfaro (88 ans, sur la photo). Le prestige dont cet homme jouit en Italie est énorme, et il est largement mérité. C'est un Catholique pratiquant, presque sur une base quotidienne. L'ancien président commentait la manière, disons, intempestive dont l'épiscopat italien intervient dans la vie politique pour s'opposer, par exemple, à un projet de loi sur les unions hors-mariage. Un projet qui pourrait ouvrir la loi à une forme de reconnaissance civile des unions homo.

Pour Oscar Luigi Scalfaro, l'Église devrait éviter toute interférence dans le débat politique. Selon lui, "si de telles interventions devaient se produire, et elles ne se sont jamais produites en 60 ans de république italienne" (et là, on admire la finesse diplomatique: comme si ces interventions musclées du Vatican étaient une pure hypothèse), "il pourrait en résulter une destruction de la liberté et de la dignité des représentants politiques catholiques, des législateurs de religion catholique". En gros: tout le monde saurait que le Vatican veut seulement des députés catholiques qui font ce qu'on leur dit de faire. "Et qui voudrait d'un groupe de députés qui ne font qu'obéir aux ordres (de Moscour ou du Vatican)? Une attitude rigide de l'Église serait très dommageable", conclut-il. Une idée qu'il avait déjà exprimée lors d'interventions passées du cardinal Ruini, notamment en février dernier (toujours sur le Pacs à l'italienne).

Bravo pour le beau geste. En espérant qu'il fasse réfléchir les hiérarques empourprés.

Enfin, si vous avez du temps ce dimanche matin, vous pourriez vous brancher sur le net et sur l'émission religieuse de BBC4. Vers 9h10 (8h10 heure locale), la radio diffuse un office depuis l'église de San Francisco qui a la réputation d'être la "paroisse gay" de San Francisco, Most Holy Redeemer (le Très Saint Rédempteur). Une paroisse jésuite à qui on a maintes fois reproché de faire la part belle aux homo, et surtout à s'associer à des organisations "douteuses" comme les Soeurs de la Perpétuelle Indulgence, le Festival International de Travesti ou d'autres animations que la bonne société catho-bourgeoise réprouve. C'est vrai qu'organiser des célébrations eucharistiques où la moitié des fidèles sont des folles et/ou des travesti, voilà qui est insupportable, n'est-ce pas. C'est bien pire que d'avoir Pinochet au premier rang parmi les communiants...

Je vous recommande d'autant plus cette diffusion radio que c'est James Alison (sur la photo) qui assure la prédication. Il sera possible également d'entendre l'office sur le site de BBC4 après la diffusion "live" ou même de lire le texte (voir en bas de la page).