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Un Blogue CathoGay
27 avril 2006

267. comme un échiquier

En Belgique, le vote au Sénat (après la Chambre) sur l'adoption est passée avec la plus courte majorité. Les couples homosexuels sont donc à égalité avec les autres devant le long et ardu parcours que tous les futurs parents doivent traverser pour se voir confier un enfant. Dès lors, le mariage gay est mis sur le même plan que le mariage hétéro. En gros, le modèle hollandais et espagnol.

Ce qui me frappe, dans la situation belge, c'est la relative discretion de l'épiscopat et des autorités religieuses. Une opposition quasi générale, certes, mais pas de prises de positions de premier front (par exemple à la télévision ou au parlement).

Par contre, et je me demande si ce n'est pas la tendance générale, l'épiscopat catholique américain se met au premier rang des opposants au mariage homosexuel. Et vu la taille et la place de ce pays dans le monde, les choses feront probablement plus de bruit.

C'est la cour de New-York qui est cette fois concernée, vu que la question du mariage homo va se décider dans quelques jours, probablement avant la fin mai. Inutile d'expliquer l'effet qu'une telle décision (dans un sens ou dans l'autre) pourrait avoir sur l'ensemble du pays.

De nombreux évêques catholiques (sept cardinaux notamment, mais pas tous les cardinaux américains,  cinq ou six archevêques) ont donc contribué à écrire les lettres amicales, ces documents que tous ceux qui sont concernés par l'affaire en cours ont le droit d'écrire au juge pour l'aider amicalement à choisir son verdict. Ceci dit, au plan local, de nombreux évêques ont envoyé des documents semblables aux juridictions ou aux parlements de leurs états respctifs.

Comment se présentent les choses: D'un côté, donc, les "religieux", l'armada catholique presqu'au complet. Mais aussi des groupes évangéliques au discours homophobe agressif. Comme on dit, "ce n'est pas parce qu'on a le même ennemi qu'on est ami": heureusement que l'épiscopat catholique fait plutôt dans l'homophobie light. Néanmoins, ça sent un peu l'alliance avec le diable.

Mais ce qui me frappe et justifie cette note, ce sont ceux d'en face. Outre une série d'organisations religieuses très respectables (les United Church Of Christ, des Épiscopaliens, des Méthodistes, des Unitariens, mais aussi des non-chrétiens dans le Judaïsme conservateur et réformé), on trouve pratiquement tout le monde scientifique, thérapeutique et celui des travailleurs sociaux, du moins leurs principales organisations, sans parler les barreaux d'avocats.

Ainsi, l'American Psychological Association et l'American Psychiatric Association sont les deux associations professionnelles de psychologues et de psychiatres les plus anciennes et très largement les plus nombreuses. Les plus respectées aussi. Toutes deux confirment que l'orientation sexuelle des parents n'est pas un facteur adéquat pour leur interdire le mariage et puis l'éducation de leurs enfants.

Trois autres organisations majeures (la National Association of Social Workers, le Child Welfare Fund, et l'Association to Benefit Children) sont d'avis que ce serait nuisible aux enfants de couples homosexuels d'empêcher leurs parents de se marier.

Les termes du débat sur le mariage homo et sur l'homoparentalité ne sont pas nouveau. Ce qui me frappe, c'est que l'épiscopat se place résolument dans l'autre camp que celui des scientifiques, des thérapeutes et des travailleurs sociaux, comme si leur expertise était secondaire ou même irrelevante par rapport à la doctrine officielle de l'Église. Une nouvelle affaire Galilée? Sauf qu'ici, ce sont des millions d'homosexuels dont l'Église demande la condamnation (et pas simplement Galilée et quelques autres), par rapport à leur manière d'aimer et de fonder une famille.

Ce qui me désole, c'est qu'une telle prise de position publique éloigne de dix ans au moins (et peut-être même d'une génération) le moment où l'épiscopat dira: nous avons pris conscience que nos déclarations étaient basées sur des données scientifiques et empiriques inexactes, et donc nous changeons de position dans cette question.

Car je ne vois pas bien des princes de l'Église se jeter dans la bataille (ce sont tout de même largement des septuagénaires, avec des doctrines ou des préjugés solidement testés) et puis, en l'espace de quelques mois ou quelques années, changer de camp.

En fait, en lançant au front les épiscopats locaux (comme on le voit en Espagne, au Canada, aux États-Unis, en Italie et ailleurs), le Vatican s'assure que les positions conservatrices actuelles resteront bien en place, même si le pontificat actuel était de courte durée et que des vues mieux informées soient exprimées par le suivant.

Soyons pessimiste: je ne vois pas d'acceptation de la notion d'orientation sexuelle (au lieu de la simple tendance) avant dix ans, pas de levée de l'empêchement d'ordination avant quinze, pas de reconnaissance de la valeur de l'amour homo avant vingt.

Que ceux qui ont des raisons d'être plus optimistes me disent comment ils raisonnent.

Quant aux cathogay dans l'épiscopat, je leur dis franchement: bougez-vous.

Pour revenir à un article précédent, je lisais une biographie de Jean-Paul 2 où l'auteur (un homophobe, ça se voit rien qu'à son emploi du terme lobby gay) s'exprimait en ces termes (je résume): Avec la mort de Jean-Paul 1er, le lobby gay était effondré, se rendant compte que tous leurs espoirs de voir leur cause avancer s'étaient envolés. Il n'est d'ailleurs pas à exclure que le lobby gay a été parmi les plus fervents à alimenter la rumeur de l'assassinat du pape Luciani, une rumeur qui a été comme une épine dans le pied de son successeur. Comme quoi, si même les homophobes disent que Jean-Paul 1er était homophile, c'est que ça devait se savoir...

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