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Un Blogue CathoGay
4 septembre 2006

321. le syndrome du village

Qu'est-ce qu'il avait besoin de s'embarquer dans cette galère? Je veux parler de l'archevêque de Glasgow, en Écosse, qui est entré dans la bagarre pour défendre neuf pompiers ayant été blâmés publiquement pour avoir tiré au flanc le jour où ils devaient distribuer des dépliants de prévention durant la Gay Pride locale, le 24 juin dernier.

Au début, en lisant les articles, je me suis dit: "Mais certains évêques n'ont vraiment rien à faire de leur précieux temps???" Pourquoi fallait-il qu'il se distingue encore en faisant tout un foin d'une affaire relativement mineure. Tout ça parce que, bien sûr, il s'agit de défendre des homophobes.

Et les commentaires acides n'ont pas manqué dans la presse, par exemple dans le Scotsman, dans le Guardian, ou bien sûr sur Gay.com.

Les faits sont simples: neuf pompiers de la ville ont décidé de ne pas aller à la Gay Pride pour distribuer les feuillets dans lesquels le Service Incendie et Sauvetage explique les précautions à prendre dans la vie courante, dans les loisirs et au travail. Pourtant, ça fait partie de leur boulot (ils sont payés pour ça) et tous leurs collègues se partagent eux aussi la présence à diverses manifestations dans la ville.

Les commentateurs n'excluent pas qu'en fait, les pompiers en question voulaient juste tirer au flanc. La preuve, c'est qu'ils n'ont rien dit à personne et ils n'ont pas demandé à se faire remplacer. Plus que probablement, ils ont passé la journée à profiter gentiment d'un pub des environs.

Mais, pris par leurs collègues à ne pas faire leur part de boulot, ils sont partis dans toute une série d'arguments soi-disant éthiques plus bidons les uns que les autres pour justifier leur absence. Le genre qu'on a souvent entendu dans des procès pour homophobie: qu'ils auraient été horriblement gênés d'être vus à la Pride, qu'ils ne supportaient pas l'idée que les fêtards (masculins, s'entend) leur fassent des propositions indécentes du genre "montre-nous ton plus gros tuyau" ou encore qu'ils auraient été choqués dans leur religiosité à l'idée de voir des gens déguisés en prêtres ou en religieuses.

Bien sûr, le Service Incendie les a proprement et publiquement blâmés en les envoyant à un cours sur l'enrichissement de la société par la diversité des communautés et des cultures (et leur officier a été dégradé pour avoir permis la chose, d'où pour lui perte sèche de 5000£, soit 7500€ par an). Pour reprendre les termes du communiqué du Service (je traduis): Les pompiers n'ont pas à choisir quand ou à qui ils vont distribuer des dépliants de prévention. Et la distribution de ces dépliants n'est pas une part mineure de leur travail. La prévention est une partie centrale du rôle que les pompiers ont à jouer. En effet, le Service Incendie tient à prévenir toutes les communautés des risques, et cela à cause du nombre important de décès et de blessés chaque année. Le Service Incendie a la responsabilité de sauvegarder la vie de chacun des 2 millions 300 mille administrés de la ville, sans exception de religion, d'origine ethnique ou de sexualité.

Point final. C'est excellent. Et je suis d'accord avec le journaliste qui fait remarquer que ça ne tient pas debout pour un homme prêt à se lancer dans une fournaise brûlante afin de sauver des vies de prétendre que rencontrer un autre homme qui remarque son beau cul va le paralyser d'effroi.

Quand au Syndrome du Village, là aussi ça ne tient pas debout. C'est un terme utilisé par les juristes après que certains aient justifié leur homophobie parce qu'ils ne pouvaient soi-disant pas supporter de voir l'uniforme de leur profession sur des chars de parade gay. Vous vous souvenez du groupe disco The Village People, avec ses six beaux mecs (dont deux seulement étaient homo, comme on l'a appris récemment), chacun dans un uniforme "de phantasme": un ouvrier, un policier, un Amérindien, un cow-boy, un motard et un marin (sur la photo). Comme si les prêtres allaient s'offusquer de voir Fernandel en Don Camillo et boycotter le film.

 

L'argument tient d'autant moins que le respect pour les pompiers est immense, y compris chez les gay et pas d'abord pour des motifs sexuels (et pourtant, si vous jetez un coup d'oeil aux calendriers des pompiers de Grande-Bretagne, de New-York, de l'état de Washington, du Canada, du Québec, ... pas de doutes, ils ont des gueules incendiaires).

Non, c'est un fait, tous ces arguments étaient fallacieux et les collègues de ces pompiers l'ont bien compris. Il n'y a même pas eu une voix de protestation de la part des syndicats ou d'autres services d'incendie en Écosse ou ailleurs en Grande-Bretagne. C'est dire.

Alors, qu'est-ce que l'archevêque catholique de Glasgow avait besoin de publier officiellement sur son site ouèbe une lettre exprimant sa désapprobation de la mesure? à part, bien sûr, montrer sa propre homophobie...

Et quoi? Les pédé ne méritent pas qu'on leur délivre des dépliants de prévention contre les incendies? Ou faut-il interdire à la Croix-Rouge de récolter le sang des pédé? C'est d'un ridicule achevé.

L'archevêque se dit même alarmé que les pompiers ayant reçu un blâme soient obligés de suivre une formation à la diversité culturelle et ethnique. Il trouve, dit-il, que certaines valeurs devraient dépasser celle de la diversité. Quoi? L'homophobie est une valeur maintenant? Et le jour où des pompiers seront racistes ou sexistes, l'évêque va aussi trouver qu'ils ont le droit de garder leur opinion au nom de leurs valeurs? Pitoyable.

Et je ne vous dit pas le message qu'il envoie aux homo (hommes et femmes) qui servent dans le Service d'Incendie. Parce que, bien sûr, Monseigneur suppose que tous les pompiers sont des mâles et des hétéro, et qu'il n'y a évidemment pas une seule pédale ou gouine dans cette vaillante phalange de héros, sans parler des femmes. J'espère que le jour où il sera pris dans un incendie ou qu'il aura besoin d'un sauvetage, les homo pompiers auront plus d'ouverture d'esprit que lui.

Je m'interroge, soit sur les ambitions personnelles de Mgr Mario Conti, qui a manqué de peu d'être cardinal (la place est allée de manière inattendue à son "concurrent" d'Edimbourg) et dont il se murmure qu'il se verrait bien promu et empourpré aux bords du Tibre.

Ou alors, comme je le disais dans ma dernière note, il s'agit encore d'un de ces hiérarques qui se posent en homophobes publics mais qui cachent en fait des combats intérieurs inavouables.

Mais qu'est-ce qu'il avait besoin de prendre position? Même les associations catholiques de pompiers ne se sont pas mobilisées, ni même leurs chapelains.

Pour ma part, je veux me souvenir aujourd'hui avec gratitude de tous ces hommes et toutes ces femmes des services d'incendie et de sauvetage, et en particulier des homo parmi eux.

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